Alan Stivell a bouleversé la musique celtique comme personne ne l’aurait imaginé. Dans les années 1970, alors que le répertoire traditionnel recule devant les courants modernes, ce harpiste breton réussit à allier héritage séculaire et a\udace créatrice pour redonner vie à un genre musical oublié. De son approche inédite, il fait renaître non seulement la harpe celtique, mais également toute la dynamique musicale du vieux continent.
Les débuts d’Alan Stivell et son héritage breton
De son vrai nom Alan Cochevelou, Alan Stivell est né en 1944 à Riom. C’est pourtant en Bretagne qu’il puise ses racines musicales et culturelles. Son père, Georges Cochevelou est à l’origine de sa rencontre avec la musique celtique en lui confectionnant une harpe celtique, un instrument sur le point de s’effacer totalement de la mémoire populaire. Dès son enfance, Alan s’imbibe de la culture bretonne qui forgera son identité artistique. Il se met à l’apprentissage de la harpe dès l’âge de neuf ans et rapidement, il se passionne pour la musique traditionnelle bretonne.
Dans les années 1960, Alan Stivell devient un acteur important du renouveau culturel breton. Membre d’associations culturelles, participant aux festoù-noz (fête de nuit traditionnelle bretonne) ou encore sensibilisé aux patrimoines musicaux par des collecteurs de chants anciens, il évolue dans un contexte culturel fort et engagé dans la défense des traditions locales. Source d’inspiration pour composer son propre répertoire traditionnellement ancré mais aussi personnel où se mêlent authenticité et nouveauté, cette période constitue une étape clé dans le parcours artistique d’Alan Stivell.
Désireux de moderniser la musique bretonne tout en préservant ses fondements traditionnels, Alan Stivell devient le pionnier d’une nouvelle ère musicale celtique. En 1970, il sort son premier album Reflets scellant ainsi les débuts d’un style particulier. L’album annonce le début d’une carrière fulgurante qui influencera durablement le paysage musical breton et au-delà. Son approche moderne et accessible parvient à séduire un large public au-delà des frontières bretonnes.
La place de la harpe celtique dans son œuvre
Au milieu du travail d’Alan Stivell, il y a la harpe celtique. Remis au goût du jour par le travail de son père, l’instrument devient sa signature. Il explore les possibilités de la harpe celtique pour la mettre au service d’une démarche moderne en tout point. Sonorités, techniques de jeu et influences multiples (rock, musique électronique…) sont au rendez-vous, mais toujours sur des bases celtique.
D’aussi bien ses compositions ne font pas de la harpe celtique simplement un instrument d’accompagnement. Elle se positionne comme une membre à part entière qui dialogue et interagit avec les autres instruments. Alan Stivell parvient à créer des ambiances éthérées ou puissantes qui transportent l’auditeur dans un monde onirique où le métaphysique semble prédominer. Il utilise aussi l’instrument pour explorer des territoires musicaux inusités, traduisant ainsi un renouvellement constant de son répertoire.
Son approche avant-gardiste et moderniste de la harpe celtique influence de nombreux musiciens et contribue à la renaissance de l’instrument qui bénéficie depuis d’un nouveau souffle en Bretagne comme ailleurs. Grâce à Alan Stivell, la harpe celtique devient un symbole fort de la musique celtique moderne dont l’influence va bien au-delà du traditionnel.
Jérémy Kergourlay, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
Les albums cultes qui ont jalonné son parcours
Si l’on devait citer l’album le plus emblématique d’Alan Stivell, on pourrait facilement désigner « Renaissance de la Harpe Celtique » sorti en 1971. Ce disque instrumental met en avant les possibilités d’expression de la harpe celtique et l’immense talent de Stivell à faire tomber les frontières entre les genres musicaux. Il s’agit là d’un tournant décisif dans la carrière du musicien, mais aussi pour la musique celtique, qui commence alors à être reconnue en France et au-delà.
Enregistré l’année suivante lors d’un concert mémorable à l’Olympia, le disque « À l’Olympia » vient sceller la renommée du musicien. Véritable condensé de l’énergie et de la magie des performances scéniques d’Alan Stivell, il permet au grand public de découvrir la musique celtique modernisée et toute sa richesse. Énorme succès, cet album offre au chanteur des mois et des mois de tournée à travers le monde, devenant ainsi une figure incontournable du renouveau celtique.
Avec « Tir na nOg » sorti en 1994, Alan Stivell continue de bousculer les traditions. Cet album qui porte le nom d’une légende irlandaise se pare de sonorités électroniques tout en demeurant profondément ancré dans les racines celtiques du musicien. Une fois encore, Alan Stivell prouve qu’il est possible d’innover et de se renouveler sans effacer ce qui a fait notre identité. En proposant un voyage musical qui traverse les époques, il démontre avec talent que la culture celtique est vivante et qu’elle peut évoluer.
Un impact déterminant sur la scène celtique,
Mais l’impact d’Alan Stivell ne se limite pas à la Bretagne. Son travail a permis de redonner une nouvelle vie à la musique celtique, qui connaît alors un regain de popularité, donnant ainsi naissance à un public mondial. Stivell a collaboré avec de nombreux artistes dans le monde entier, permettant à la culture celtique de s’exprimer sur toutes les scènes et tous les pays. Grâce à son approche novatrice, il a inspiré des musiciens de tous styles et façonner le paysage musical international, faisant enfin reconnaître la musique celte comme genre musical en soi.
L’essor que connaît la musique celtique dans les années 70 – 80 grâce à Alan Stivell permet aux festival de musique celtique qui se multiplie à cette époque de connaître un rayonnement sans précédent. Il participe à plusieurs d’entre eux et ses concerts sont toujours très attendus. En tant que véritable ambassadeur de la musique celte, Stivell contribue également à faire découvrir des artistes celtiques émergents, créant ainsi un véritable réseau d’échanges culturels entre les pays celtes et au-delà. Son rôle de passeur culturel est reconnu et salué par ses pairs, faisant de lui une figure emblématique de la scène celtique.
Enfin, l’engouement pour la musique celtique qui s’est développé ces dernières années notamment grâce à l’impact d’Alan Stivell se traduit également par une reconnaissance institutionnelle et académique de cette culture au niveau international. Des études sur la musique bretonne et la langue bretonne se développent et la harpe celtique devient un instrument largement enseigné dans les conservatoires du monde entier. Alan Stivell a véritablement réussi à redonner vie à un patrimoine culturel riche pour en assurer sa pérennité.
Alan Stivell aujourd’hui : entre tradition et modernité
À plus de 70 ans, Alan Stivell se produit toujours sur scène et compose. Sa carrière, qui s’étale sur plusieurs décennies, est une recherche perpétuelle de renouveau. Toujours en quête d’innovation, il n’hésite pas à piocher dans la musique contemporaine, comme l’électro ou le rock progressif, tout en gardant une approche fidèle à l’ADN de la musique celtique. Cette faculté à ne jamais perdre de vue ses racines tout en évoluant lui permet d’être un artiste hors du temps.
Stivell est également un grand défenseur de la culture bretonne et celtique. Il participe à des programmes qui soutiennent la langue bretonne et qui font découvrir la musique traditionnelle aux jeunes générations. Cet engagement ne se limite pas à son activité sur scène, puisqu’il consacre une grande partie de son temps à des causes culturelles et sociales qui lui sont chères. De ce fait, il est considéré aujourd’hui comme une voix influente et respectée dans le paysage culturel breton et celtique.
Alan Stivell, avec son parcours hors du commun, représente ce que la musique peut faire de mieux : transcender les époques et les frontières. Son œuvre à la fois profondément ancrée dans la tradition et ouverte à toutes les modernités inspire et touche toujours un peu plus d’auditeurs. Et son héritage aussi riche que varié témoigne de cette vitalité et de cette universalité que possède la musique celtique dont il demeure l’un des plus brillants ambassadeurs.